Interview.. Depuis 2018, Aline Clément prend part au projet Donnons des Elles au Vélo. Cette année, elle est arrivée amoindrie en raison d’une tendinite au niveau du quadriceps. Durant les premiers jours, la Vosgienne était un peu sur la réserve. Puis, les sensations sont revenues petit à petit au fil des kilomètres engloutis depuis le début de cette aventure. Ce vendredi, à l’occasion de cette première journée de repos, Aline est revenue sur « l’entame la plus difficile sur ces trois dernières années ». La professeure de sport a également évoqué les deux prochaines semaines, de ce qui apparaît comme la dernière épopée sous ce format. Ne vous inquiétez pas, Aline et ses copines reviendront de plus belles, l’année prochaine, avec un message différent afin de continuer à promouvoir le cyclisme féminin sur notre territoire.
Aline, comment allez-vous physiquement ?
Cela fait neuf jours que l’on pédale. On se rapproche à grand pas de la moitié du parcours de cette édition 2020 alors que l’on aborde seulement notre première journée de repos. Physiquement, tout va bien pour moi et pour toute l’équipe. Il y a juste quelques bobos mais rien de grave.
Comment avez-vous vécu cette première semaine sur le Tour de France ?
Je n’étais pas très sereine en arrivant sur cette édition 2020 car je me suis blessée à l’heure du déconfinement. Quelques jours avant le Grand Départ, j’étais encore en train de soigner ma tendinite au niveau de l’axe externe du quadriceps. Forcément, ma préparation n’a pas été optimale pour prendre part à une telle aventure. Cependant, ce n’est pas ma première expérience avec Donnons des Elles au Vélo. Je n’avais pas d’inquiétude concernant ma participation à l’édition 2020 car j’ai beaucoup roulé durant l’hiver, et j’ai poursuivi mes entraînements sur le home-trainer durant le confinement. Malgré ces deux derniers mois un peu compliqués, j’étais au départ à Nice. Pour être honnête avec vous, j’étais en difficulté sur les premiers jours,. J’ai vite repris confiance puisque mon tendon a tenu le choc. Aujourd’hui, je pense que ma blessure est derrière moi. Je ne ressens plus de douleur après neuf jours sur la route, et près de 1 600 kilomètres parcourus, avec un gros dénivelé positif.. J’ai enfin retrouvé de bonnes sensations et je me sens moi-même sur le vélo.
Depuis votre arrivée en 2018 au sein du projet Donnons des Elles au Vélo, pensez-vous vivre un début de Tour aussi difficile ?
C’est la plus difficile en terme de dénivelé positif. En 2018 et 2019, les premières étapes étaient plus simples, si on peut le dire comme cela. Cette année, on enchaîné neuf vraies étapes, dont la plus courte était de 145km avec 3 300m de dénivelé positif et la plus longue était de 201km. Il a fallu faire également avec les fortes chaleurs et les longues heures par jour sur le vélo. Pour toutes ces raisons, c’est l’entame la plus difficile sur ces trois dernières années.
Selon vous, cette première semaine pourrait-elle faire des dégâts parmi les favoris du Tour de France ?
Ce sera un Tour de France inédit en raison de la crise sanitaire. Je pense que les coureurs vont arriver dans un tout autre état d’esprit. Ils n’auront sans doute pas pu s’entraîner comme ils le voulaient Sur un parcours très exigeant, qui est fait pour les grimpeurs, je pense que cela peut vraiment s’agiter si les favoris prennent leurs responsabilités sur ce début de Tour de France. Il y aura moyen de régaler les téléspectateurs durant les trois semaines de course.
Quel souvenir le plus marquant gardez-vous en mémoire durant cet entame de Tour ?
On a eu un superbe accueil hier (jeudi) à Laruns. Cela avait déjà été le cas en 2018. Forcément, cette nouvelle arrivée dans cette commune pyrénéenne a réveillé de fortes émotions pour nous. Il y a eu l’également la montée finale vers Orcières-Merlette, juge de paix de cette quatrième étape du Tour., où de nombreuses personnes étaient présents au sommet pour nous accueillir. C’était un chouette moment.
Quel est le programme pour vous sur cette journée de repos ?
On a eu un peu plus de temps pour dormir. Ensuite, on a pris la route pour rejoindre Rochefort, notre hébergement pour les deux prochaines nuits. Comme on est présent durantes deux jours ici, on pourra en faire tourner les machines. On en profitera donc pour laver notre linge sale. Il aura largement le temps de sécher. Ensuite, on a pris une douche car il a fait trop chaud durant ce transfert. Ensuite, on ira se balader avant d’aller diner. Aujourd’hui, on a plus de temps pour les massages.C’est donc un petit répit pour nous car c’est une journée sans pédaler.
Comment appréhendez-vous la suite de l’aventure ?
On va prendre chaque jour les uns après les autres car on sait très bien ce qu’il nous reste à accomplir sur ce Tour de France. Après la journée de repos, on aura enfin deux étapes plates qui nous attendent. Cela permettra de remettre en route. Ensuite, le Massif central va très vite arriver. Il n’y a pas d’appréhension à avoir. Si le physique tient, tout ira bien. Pour ma part, j’ai pris beaucoup de plaisir dans les Pyrénées. J’adore les étapes de montagnes. Je sais que pour certaines, ce n’est pas leur tasse de thé. Il faut être solidaires les unes avec les autres afin d’arriver toute ensemble sur les Champs-Élysées.
D’habitude vous ouvriez le Tour un jour avant les professionnels. Cette année, ce sera un mois avant eux. Vous attendiez-vous à voir un tel engouement autour de votre projet ?
Il y a un engouement très important sur cette édition 2020. On trouve que les automobilistes sont plus apaisés et klaxonnent moins lorsqu’ils voient un tel peloton. Ils nous applaudissent et nous encouragent. Sur Donnons des Elles au Vélo M-1, je trouve que les collectivités ont beaucoup communiqué autour de notre aventure. De notre côté, on a sensibilisé les communes à notre cause sans leur demander quoi que ce soit. Dans ce contexte particulier, on voit que les collectivités ont pris le temps, et l’envie, de nous accueillir pour promouvoir le cyclisme féminin. Cette année, on a davantage de reconnaissance par rapport aux années passées.
Avant l’arrivée à Paris, quel message avez-vous envie de véhiculer sur les routes du Tour ?
Depuis six ans, nous militions pour un retour d’un Tour de France féminin. Ce message a été entendu puisque Amaury Sport Organisation (ASO) a annoncé l’organisation d’une course à étapes en France et médiatisée pour les féminines professionnelles, à l’horizon 2022. Officiellement, rien n’est encore fait mais je pense pas qu’il y aura un retour en arrière. Cette année, c’est notre dernière aventure sous ce format. On n’a pas envie de stopper cette belle aventure car Donnons des Elles au Vélo est devenu populaire au fil des années. On réfléchit déjà pour donner un nouveau souffle à notre projet. Désormais, on a envie d’insuffler un nouveau message. Celui d’une grande fête du vélo. Mais surtout que les femmes et les hommes partagent la route sur l’ensemble du territoire tout en y mêlant davantage les collectivités locales au coeur de notre cause. En pratique, on ferait les étapes, un jour avant les professionnels, mais on aura un discours différent…